Prosulfocarbe : un nouvel herbicide défraie la chronique
Qu'est-ce que le prosulfocarbe ?
Le prosulfocarbe est une substance herbicide racinaire, qui a reçu sa première approbation de la Commission européenne en 2009. Ce pesticide est présent dans plus de 10 produits utilisés en agriculture conventionnelle pour désherber les cultures de nombreuses graminées et de quelques autres plantes (pomme de terre, carotte, céleri-rave, oignon, plantes à parfum et médicinales non alimentaires...). Le recours à ces produits est très répandu dans les cultures céréalières pour éviter la prolifération de mauvaises herbes, notamment en automne (en 2018, le prosulfocarbe prenait la seconde place des herbicides les plus utilisés en France, derrière le glyphosate).
Quelle est la toxicité du prosulfocarbe ?
D'un point de vue environnemental, le prosulfocarbe est difficilement biodégradable et est toxique pour les organismes aquatiques, avec des effets sur le long terme.
Mais en ce qui concerne ses répercussions sur la santé humaine, on a encore que très peu de données (outre son action irritante pour les voies respiratoires, la peau et les yeux). Toutefois, des études en laboratoire* auraient montré des effets néfastes sur les chromosomes qui laissent présager le développement de maladies. De même, une mission d’expertise sur l’utilisation des produits phytopharmaceutiques**, mandatée par les ministres de la Transition écologique et solidaire, des solidarités et de la santé et de l’Agriculture et de l’alimentation, mentionne un effet reprotoxique du Prosulfocarbe.
Pour autant, à l'heure actuelle, cette substance ne possède pas de classement cancérogène, mutagène ou toxique pour la reproduction et n'est ni soumise à exclusion ni à substitution au niveau européen.
La volatilité du prosulfocarbe et les répercussions économiques
Le prosulfocarbe est très volatile. Après pulvérisation, on peut le retrouver à plusieurs kilomètres du lieu de traitement, sur des cultures non traitées. Outre le doute qui plane sur la toxicité du produit, les cultures (qu'elles soient bio ou non) non ciblées par ce désherbant, mais contaminées, peuvent se retrouver non autorisées à la vente, déclassées ou détruites.
De nombreux cas de forte contamination de ce type ont été signalés ces 5 dernières années, et ce, malgré un certain durcissement des conditions d'épandage et d'homologation en 2017 (avec une obligation d'utiliser un matériel homologué pour l'épandage afin d'en limiter la dérive) et en 2018 (par la mise en place d'un calendrier d’épandage obligeant d'attendre la fin des récoltes des cultures « non cibles » se trouvant dans un rayon de 1 km des champs traités, avec des ajustements possibles pour les cultures situées entre 500 m et 1 km).
À savoir : seules 33 cultures sont identifiées comme étant « non cible ». Pour tout le reste, les zones habitées y comprises, aucune mesure de protection n'a été prise.
La situation actuelle
Alors que la demande de renouvellement de l'approbation par la commission européenne est actuellement en cours d'examen (une prolongation de sa validité avait été acquise jusqu'au 31 octobre 2022), le rapport annuel d'ATMO NA (l'observatoire régional de l'air de Nouvelle-Aquitaine) met le feu aux poudres en juillet 2022 : une très forte augmentation du prosulfocarbe est relevée dans l'air, en Charente-Maritime, entre 2019 et 2021 (présence dans l'air multipliée par 10 en deux ans).
Depuis, habitants, élus, associations se mobilisent et demandent la suspension de l’autorisation de mise sur le marché du prosulfocarbe. Le ministre de l’Agriculture, quant à lui, a demandé à l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) de faire une étude sur les risques pour la santé, et à l'INRAE (Institut national de la recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement), un rapport sur une alternative non chimique au prosulfocarbe. Les résultats sont très attendus.
* Marc Maigné, médecin et élu référent de l'agglo La Rochelle, pour la santé.
** « Utilisation des produits phytopharmaceutiques » - Tome 1. Rapport établi par Alexis DELAUNAY et Catherine MIR ( Membres du Conseil général de l’environnement et du développement durable), Clémence MARTY-CHASTAN et Erik RANCE (Membres de l’Inspection générale des affaires sociales) et Didier GUÉRIAUX et Robert TESSIER (Membres du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux).
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