Les forêts primaires
Qu'est-ce qu'une forêt primaire ?
Une forêt primaire est une forêt n'ayant subi aucune intervention humaine depuis des millénaires, ni aucune pertubation des processus écologiques qui s'y déroulent. Les arbres et les autres végétaux, les animaux (mammifères, insectes, reptiles, oiseaux, micro-organismes du sol et champignons saproxylophages -ceux qui décomposent le bois mort-) y constituent un écosystème riche, varié, équilibré et durable. Les espèces et les habitats y sont plus diversifiés qu'ailleurs ; et ces espèces sont souvent indigènes, et donc parfaitement adaptées au climat.
Dans ces forêts préservées, les arbres naissent, grandissent et meurent à leur rythme : on trouve des sujets de tous les âges, sur différentes strates, y compris des arbres très âgés, et les arbres morts tombent au sol où ils se décomposent pour enrichir le sol et nourrir la biomasse (dans une forêt exploitée, les peuplements ont sensiblement le même âge, le sous-bois est nettoyé des espèces "non désirées", et les arbres morts sont évacués : autant de gestes qui laissent bien peu de chances à la biodiversité).
Enfin, dans ces forêts primaires, l'espace est continu : pas de fragmentation des habitats, et donc nul besoin de "trame verte" pour la circulation et la reproduction de la faune et de la flore.
Forêts primaires, forêts vierges : tropicales, mais aussi tempérées !
La forêt vierge, le cliché de l'Amazonie
Un tiers des forêts de la planète sont des forêts primaires. La confusion est fréquente entre forêt équatoriale (ou tropicale) et forêt vierge. Pourtant, toutes les forêts équatoriales ne sont pas vierges, et toutes les forêts primaires ne sont pas équatoriales ! Certes, la plupart d'entre elles se trouvent en Amazonie, en Indonésie et dans le bassin du Congo, et la Guyane Française compte quant à elle 90% de sa surface occupée par des forêts primaires.
Des forêts primaires en Europe, en France ?
Mais les forêts "primitives" ne sont pas seulement tropicales. Il existe aussi des forêts primaires tempérées, notamment aux Etats-Unis, en Patagonie, en Tasmanie, en Colombie Britannique (province de l'ouest du Canada), et, dans une moindre mesure, en Europe, où la plus vaste se situe en Pologne (forêt de Bialowieza). En Europe, les forêt primaires sont cependant rares et ne représentent que 1 à 3% de la surface boisée.
En France, ce sont même plutôt des "confettis" de forêts primaires qui subsistent, notamment dans des zones peu peuplées, difficiles d'accès, ou dont la topographie rend la mécanisation de l'exploitation forestière ou même l'agriculture impossibles. On peut citer la réserve naturelle du Grand Ventron, dans les Hautes-Vosges, qui compte 300 ha de hêtraie primaire (ainsi que des tourbières, autre type d'écosystème naturel menacé).
>> Lire aussi : La forêt française
Quelles menaces pèsent sur les forêts primaires ?
15 millions d'hectares de forêt primaire sont détruits chaque année dans le monde par la déforestation, soit pour obtenir des terres agricoles, soit pour l'exploitation de certaines essences forestières, soit pour construire des infrastructures.
Dans le meilleur des cas, après le déboisement, une forêt secondaire s'installe, mais avec 5 fois moins d'espèces présentes. Dans le pire des cas, le sol a été tellement abîmé et appauvri par certaines pratiques agricoles que de nombreuses années sont nécessaires pour qu'il retrouve sa fertilité. On estime qu'il faut au moins 700 ans de développement libre et naturel -sans aucune intervention humaine- pour qu'une forêt primaire se reconstitue.
Et ce n'est pas toujours le déboisement illégal qui est en cause : en Europe, la sylviculture représente une menace pour ces forêts primaires, notamment en raison de l'engouement actuel pour la biomasse énergie (chauffage au bois par exemple).
Des espaces naturels à préserver
On l'a vu, ces forêts primaires sont de précieux réservoirs de biodiversité : en Europe, elles abritent des espèces animales emblématiques tels que le lynx, le loup, le bison, l'ours, le grand tétras, la cigogne noire... et bien d'autres encore, plus discrètes mais tout aussi proches de l'extinction, parmi lesquelles des insectes, des oiseaux, des reptiles ou des amphibiens, sans même parler de la flore.
Ces forêts, bien que menacées par l'activité humaine, peuplées d'essences spontanées et indigènes très variées, sont pourtant plus résistantes, plus résilientes face aux perturbations (changement climatique, apparition de nouvelles maladies ou de nouveaux parasites des arbres -graphiose de l'orme, chalarose du frêne, mineuse du marronnier, maladie du chancre coloré sur les platanes... : autant de ravageurs qui progressent beaucoup plus facilement dans un peuplement végétal peu diversifié).
>> Voir notre diaporama : Forêts du monde
Pour l'avenir...
L'enjeu des prochaines décennies sera de continuer à inventorier ces sites extraordinaires, de mieux les protéger d'un point de vue réglementaire (et de faire respecter la réglementation !), voire de favoriser leur réhabiliation, et de sensibiliser les jeunes générations à la richesse biologique de ces sites... le tout en conciliant intérêt écologique et nécessités économiques. Un challenge !
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