La phytoremédiation, ou comment les plantes dépolluent sols et eaux
La phytoremédiation, ça consiste en quoi ?
"Phytoremédiation", voilà un terme bien savant et bien sophistiqué ! Mettons-nous tout de suite à l'aise avec une définition simple : la phytoremédiation, cela consiste à utiliser des plantes pour dépolluer le sol, l'eau ou l'air. Pour ce qui est de débarrasser de ses polluants l'air des habitations et des bureaux, les fameuses plantes dépolluantes, à la mode depuis quelques années, ont une efficacité controversée. En revanche, l'aptitude des racines des végétaux à extraire certains polluants chimiques, à les stocker ou même à les dégrader, n'est pas mise en doute. Ces éléments nocifs peuvent être présents dans le sol, mais aussi dans l'eau, dans le cas de cultures hydroponiques ou lors de l'utilisation d'eaux usées pour l'arrosage des cultures "dépolluantes".
Phytoremédiation : quels avantages, quelles contraintes ?
La phytoremédiation offre plusieurs avantages qui font d'ailleurs son succès (en particulier dans les pays scandinaves, ou au Canada) :
- C'est une technique efficace et sûre ;
- C'est une technique peu coûteuse (10 à 100 fois moins que d'autres procédés de dépollution) ;
- C'est une technique rentable : dans de nombreux cas, la biomasse produite sur des sites pollués peut être exploitée (pour donner de l'énergie, du fourrage en cas de non-transfert des polluants aux parties aériennes, des métaux...) ;
- C'est une technique applicable à de vastes surfaces (sites industriels ou miniers, anciennes raffineries...).
Quelques limites cependant à ces techniques :
- La phytoremédiation n'est efficace que pour les contaminations de surface (il faut que les racines puissent atteindre les polluants) ;
- La dépollution du site ne doit pas avoir un caractère d'urgence car la phytoremédiation est un processus long (un an, 5 ans, 10 ans... voire plusieurs décennies pour les métaux lourds) ;
- Les plantes utilisées doivent être adaptées au climat de la zone géographique ;
- Les concentrations en polluants ne doivent pas être trop élevées, car certaines plantes ont beau se montrer résistantes à la pollution et capables de pousser dans des sols très contaminés, il faut tout de même des concentrations compatibles avec la vie !
Un progrès considérable
Par rapport aux techniques habituelles de dépollution des sols, qui consistent à extraire des quantités parfois impressionnantes de terre contaminée, et à aller les enfouir ailleurs (simple déplacement de pollution...), ou à les traiter chimiquement lorsque les quantités sont faibles, la capacité qu'ont les plantes de stabiliser, dégrader ou extraire les polluants des sols est réellement intéressante.
Les différents types de phytoremédiation
Les plantes peuvent assainir le sol de plusieurs manières (nous ne parlerons pas ici de l'assainissement des eaux, mais le principe est le même).
Phytostabilisation : éviter la dispersion des produits nocifs
La plus basique est la phytostabilisation : d'un point de vue mécanique, planter une couverture végétale sur un sol pollué évite la dispersion des poussières chargées en éléments nocifs (généralement des métaux lourds : cadmium, plomb, zinc...), ainsi que le lessivage du sol par les eaux de ruissellement, source de pollution pour les nappes phréatiques. En outre, les racines peuvent fixer et stabiliser ces métaux lourds. Les plantes choisies doivent être résistantes à la pollution et posséder un système racinaire très développé (peupliers, saules, aulnes, graminées telles que Festuca rubra...).
Phytodégradation : "consommation" des polluants par les plantes
Autre type de phytoremédiation, plus radical : la phytodégradation. Dans ce cas-là, des polluants organiques qui résistent à la dégradation "naturelle" dans le sol (et qui ont donc une rémanence importante, tels que les hydrocarbures aromatiques polycycliques ou les solvants chlorés) sont rapidement dégradés par les bactéries qui vivent en symbiose avec les racines (rhizosphère), et métabolisés par la plante. Le système sol-bactérie-racine agit alors comme une véritable petite centrale de traitement des déchets. La luzerne est souvent cultivée dans ce but (d'autant que, comme toutes les plantes de la famille des Légumineuses, elle fixe l'azote de l'air et en enrichit le sol), ainsi que les saules (Salix viminalis).
Phytovolatilisation : libération dans l'atmosphère
La phytovolatilisation, quant à elle, se traduit schématiquement ainsi : la plante, toujours grâce aux micro-organismes présents autour de ses racines, absorbe certains polluants présents dans le sol (minéraux comme le sélénium ou le mercure, composés organiques légers comme le trichloroéthylène), ceux-ci passent dans la sève et sont évacués dans l'atmosphère, sous forme de gaz, au niveau des feuilles, soit tels quels (ils sont alors dégradés par les UV, comme c'est le cas pour le trichloroéthylène), soit sous forme modifiée, volatile et non toxique, ou en tout cas, moins toxique (mercure, sélénium méthylé).
Phytoextraction : les plantes "pièges"
Pour d'autres composés chimiques, ils sont absorbés par les racines de la plante et stockés en quantités plus ou moins importantes dans ses parties aériennes (feuillage généralement) : on parle de phytoextraction par des plantes phytoaccumulatrices. La plante se présente donc comme un piège à polluants (métaux lourds : zinc, cadmium, nickel). Mais question : que fait-on ensuite de ces plantes "poubelles" ? Soit on les brûle, et il reste alors à traiter chimiquement les cendres pour les débarrasser de leurs métaux lourds (mieux vaut traiter des kilos de cendres que des tonnes de terre !), soit on les exploite : ces métaux, qui ont une valeur et peuvent être réutilisés, sont extraits de la matière végétale. La plante est alors appelée "phytomine" : ainsi, il est possible de "récolter" 100 kg de nickel par hectare de culture d'Alyssum murale sur un sol contaminé par le nickel.
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